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Entretien avec Julien Gilles de la Londe, réalisateur d’un Docufiction sur la confrérie soufie

« UNE RENCONTRE VAUT MIEUX QUE MILLE RENDEZ-VOUS », Docufiction réalisé par Julien Gilles de la Londe, écrit par Fréderic calmés et Julien Gilles de la Londe, vient d’être projeté au café culturel – dar Tazi dans la cadre du Festival de Fès des musiques sacrées du monde, au Maroc. Ce Docufiction de 94 minutes met en scène un Français accueilli au cœur du Maroc traditionnel, au cœur d’une confrérie soufie et donc de l’Islam. Membre de la confrérie des Hamadcha, Frédéric, Youssef pour ses amis de la campagne, lutte obstinément contre le déclin de la confrérie qui ne compte plus que quelques dizaines de membres. Il participe aux cérémonies, accède à la baraka, à la transe, il fait partie des leurs. Pourtant, les Hamadcha ne lui ont jamais demandé de se convertir…Leur rencontre va bien au-delà.

Truffé d’humanisme subtilement distillé au gré d’un scénario vide de stéréotypes, ce Docufiction renvoie chacun de nous à ses propres interrogations sur l’amour et la quête de soi. Aucune émotion n’est édulcorée, aucun plan n’est en trop et le principal protagoniste est prodigieusement spontané. Ce Docufiction franchement très réussi devrait avoir un avenir des plus radieux. Entretien avec son réalisateur Julien Gilles de la Londe.

Parlez-nous de votre découverte des Hamadcha, et de l’idée de tourner un Docufiction sur eux ?

C’est en rencontrant Frédéric par hasard et en découvrant son univers fascinant que je suis tombé amoureux de son histoire. L’idée est venue lorsqu’il m’a emmené chez lui à la campagne, dans la région de Fès, là où il habite.

Justement, parlez nous de votre rencontre avecFrédéric Calmès.

J’ai été fasciné par ce personnage, ce français qui vit au fin fond du Maroc. Son histoire m’a intrigué. Pourquoi est-il là ? C’est vraiment étonnant ! Après j’ai découvert la musique Hamadcha, et j’avais des poils qui se dressaient tellement c’était beau. Le coté solennel, à la fois solennel et mélodieux. Et en France, c’est un peu fini, c’est ça ce qu’est venu chercher Fred. C’est la 1ére fois que je découvrais les Hamadcha. Ce fut une belle expérience sensorielle. J’ai été très touché de voir les Hamadcha. La notion de spiritualité est vraiment présente, et c’est déroutant pour moi en tant que non croyant.

Quel lien entretenez-vous avec le sujet de votre film ?

La religion ne m’intéresse pas plus que ça, c’est plus la musique, et la rencontre humaine entre ce français et ces Hamadcha qui l’on accueilli à bras ouvert, comme s’il était des leurs…

Quelles difficultés avez-vous éventuellement rencontrées au cours du tournage ?

Le tournage était très compliqué dans la mesure où il était difficile de filmer des lieux comme le Moussem de Sidi Ali. Fréderic et les Hamadcha étaient notre sésame, car si Fred n’était pas initiateur du film avec moi, jamais on aurait pu entrer dans beaucoup d’endroits. Même dans ce contexte, en permanence, rien n’était jamais sûr. L’équipe était assez réduite, confortable pour un documentaire mais insuffisante pour une fiction. Donc le rythme était acharné : matin midi et soir.

Pouvez-vous nous parler de votre équipe sur ce film ?

En dehors du chef opérateur qui était français, toute l’équipe était Marocaine, et le moins que l’on puisse dire c’est que l’équipe était vraiment courageuse.

Les Hamadcha ont visiblement une mauvaise image dans nos contrées, comment expliquez-vous cela ?

L’orthodoxie musulmane a toujours eu un rapport compliqué avec le soufisme, « je t’aime, moins non plus ». Et puis les Hamadcha ont des pratiques populaires que certains estiment donner une mauvaise image du Maroc.

Comment a été accueilli votre film ? N’y a-t’il pas eu de censure ?

Mon film est en général positivement accueilli, mais il est vrai que les rapports compliqués qu’entretiennent les pays musulmans avec le soufisme affectent un peu son exposition.

Vous donnez beaucoup d’importance à la musique dans ce Docufiction. Les accents propres à la musique, son harmonie, ses couleurs, sont-ils pour vous des éléments de contrepoint, d’interaction avec votre mise en scène ?

Il s’agit d’un film musical où les morceaux doivent avoir le temps de s’installer pour pouvoir être compris. J’ai préféré privilégier la longueur des morceaux plutôt que l’exhaustivité du répertoire Hamadcha.

La fin du film laisse place à un dialogue entre les protagonistes du film sur la nécessité de fusionner ou non l’art des Hamadcha. Quelle-est votre position ?

C’est une bonne question. Je suis partagé. En tant que public, je suis davantage touché par les Lilas traditionnelles, mais les rapprochements actuels des Hamadcha avec d’autres artistes permettent de moderniser la tradition et d’attirer à nouveau des jeunes vers les Hamadcha. Donc c’est positif, et musicalement, de très belles surprises peuvent apparaitre.

La transe est présente dont plusieurs genres musicaux. En Flamenco ça s’appelle le Duende, chez les Hamadcha, la Hadra. Quelle est particularité de la transe desHamadcha ?

La musique est magique, elle permet de nous évader de nous même. Les Hamadcha, comme tous les soufis, par la musique, par la transe, accèdent au Hal, à l’extase divine. Donc ils sont en contact direct avec Dieu.

Pour vous, réussir un film, ça veut dire quoi ?

Truffaut disait qu’un beau film trouve toujours son public…

Le cinéma, c’était un rêve d’enfant ? C’est lié à l’enfance, d’une certaine manière ?

Oui, je suis tombé dans le cinéma tout petit, et mon amour pour le cinéma vient tout d’abord du cinéma italien ; La méchante comédie italienne, et la poésie de Fellini.

Un dernier mot pour finir…

Cette histoire est une leçon de tolérance et d’ouverture donnée par les musulmans aux occidentaux. Elle véhicule une vision de l’islam qui tranche avec les clichés véhiculés dans les médias occidentaux.

Propos recueillis par Hamza Mekouar

*Julien Gilles de la Londe est un réalisateur français de 37 ans. Autodidacte, il a tourné de nombreuses fictions courtes, clips et art vidéo. Julien est un amoureux invétéré du Maroc.

*Frédéric Calmès, musicien chanteur, chroniqueur radio, se bat pour valoriser et promouvoir tous les Hamadcha du Maroc et en particulier ceux de Fès.

*Aux côtés des Gnawa et des Aïssawa, les Hamadcha font partis des trois confréries soufies dites « populaires » les plus importantes du Maroc. Les Hamadcha du Maroc font partie de la grande et très ancienne confrérie soufie Hamdouchiyia. Ses membres sont des mystiques qui jouent de la musique, chantent les louanges de Dieu et dansent jusqu’à la transe extatique en l’honneur des deux saints fondateurs de la confrérie, les faiseurs de miracles Sidi Ali ben Hamdouch et son compagnon Sidi Ahmed Dghughi. C’est de ces deux saints hommes qu’ils tirent, dit-on, leur baraka, leur grâce divine qu’ils transmettent à ceux qui les approchent.

Source: http://www.dailymaroc.com

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