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Que penser de la T.A.O (Traduction Assistée par Ordinateur)?

Un contexte changeant
L’évolution des besoins de traduction technique, commerciales, publicitaire, juridique…liés à la mondialisation conduit aujourd’hui les entreprises à un autre mode de gestion de leur chaine documentaire.

Ce nouveau mode a pour effet l’accélération de la cadence de l’actualisation de leurs données et ceci dans plusieurs langues. Nous serions alors tentés de dire que ce phénomène constitue une aubaine tant pour les agences de traduction que les traducteurs indépendants qui ont tendance à se spécialiser de plus en plus dans des secteurs spécifiques. Cependant de façon concomitante, comme dans tout marché en fort développement, on constate le développement d’une stratégie concurrentielle très agressive reposant essentiellement sur la recherche des coûts le plus bas. L’objectif essentiel est alors de remporter un nombre maximum de marchés.

Dans un tel contexte, si les traducteurs techniques veulent simplement survivre dans leur métier, ils doivent nécessairement se distinguer des autres tout en respectant scrupuleusement le rapport prix, qualité, délais. Au-delà de ce trinôme incontournable ils doivent aussi intégrer parfaitement les terminologies et les micro-langages sectoriels, composantes essentielles d’une démarche qualitative. C’est à ce niveau que les outils de traduction assistée par ordinateur (TAO), vont théoriquement permettre au traducteur de gagner du temps et de rentabiliser son activité.

Les outils de TAO
Les outils de TAO sont des logiciels qui présentent des caractéristiques certes différentes mais reposant sur le même principe. Ils se présentent généralement sous la forme de bases de données ou de plateformes opérationnelles multifonctions, destinées à rendre plus facile le travail des traducteurs ou ressources internes conduits à gérer des supports multilingues. Ces bases de données font appel à des mémoires de traduction qui enregistrent les traductions au fur et à mesure de leur progression.

Théoriquement, un logiciel de TAO permet d’assister la traduction des documents d’une langue, dite langue source, vers une autre langue, dite langue cible. Par exemple, la traduction d’un document en Français (langue source) vers un document en Anglais (langue cible). Légitimement nous pouvons nous poser la question suivante: qu’elle est la qualité d’une traduction produite par un logiciel de TAO? Ici la réponse n’est pas si simple, car plusieurs facteurs peuvent affecter la qualité de la traduction: le logiciel utilisé, la procédure d’alignement, le temps.

Le logiciel utilisé
Dans l’état actuel des choses 85 % des traductions restent satisfaisantes, 7% restent

« approximatives » (préservation de la plus grande partie du sens source), 3% sont des traductions « impropres » (la plus grande partie du sens source est perdu, mais reste compréhensible grâce au contexte), et enfin 3% sont « incorrectes » (perte totale du sens source et de la compréhension). ¹

Les raisons sont diverses: descripteur trop général, caractère limité des investigations qui ne portent que sur la phrase et donc sur un environnement trop étroit, ambiguïté totale du verbe dans la phrase,…

L’alignement
Quel que soit le logiciel utilisé, la première étape consiste à aligner les traductions déjà existantes. Concrètement, il s’agit tout d’abord d’introduire dans la machine un texte source (en Français, par exemple) et un texte cible (en Anglais) correspondant à sa traduction. Le logiciel procède alors à la segmentation des textes. Autrement dit, il découpe les deux textes en segments appelés unités de traduction.

Néanmoins, en matière de qualité de traduction, si ce système, facilite la cohérence d’ensemble, il peut poser des difficultés : les phrases étant séparées, le traducteur remarque par exemple moins les répétitions ou les erreurs d’accord. Il est également plus difficile, parfois impossible, de remanier un paragraphe pour l’adapter au style de la langue cible.

Le temps
Les délais de plus en plus serrés qui conduisent les traducteurs à ne pas consacrer le temps nécessaire à la saisie souvent fastidieuse des traductions déjà existantes ou au contraire à dépenser plus de temps non rémunéré dans les procédures d’alignement.

Les avantages de la TAO
Automatisation du travail
La première contribution apportée par la traduction assistée par ordinateur est de permettre d’automatiser le travail du traducteur.
En effet, les outils d’aide à la traduction permettent de rentabiliser les données multilingues en recyclant automatiquement les traductions existantes le but de la TAO étant de ne jamais traduire deux fois la même phrase.
En supprimant le travail répétitif, le traducteur peut diminuer le temps consacré à traduire ainsi que les délais de livraison. Disposant de plus de temps, il est donc à même de prendre en charge des volumes beaucoup plus importants, accroissant ainsi ses revenus, à condition de ne pas diminuer ses tarifs. Les outils de TAO permettent donc, a priori, d’accroître la productivité de ses utilisateurs et le rendement de leurs traductions.

Harmonisation et terminologie
Même si les glossaires spécialisés existent depuis fort longtemps, les outils d’aide à la traduction permettent également de réaliser des traductions plus cohérentes au niveau terminologique, améliorant de ce fait la qualité des documents livrés. Néanmoins, des traducteurs compétents savent aussi alimenter leurs propres glossaires et les utiliser efficacement.

Enfin, les outils de TAO améliorent également l’homogénéité des traductions en équipe par une intégration et une mise en réseau des mémoires et glossaires disponibles.

Les inconvénients de la TAO
Il ne faut pas oublier que les avantages que nous venons d’évoquer sont partie intégrante de l’argumentaire mis en avant par les éditeurs de logiciels de TAO. Si ces avantages théoriques demeurent très séduisant qu’en est-il vraiment dans la pratique ? La qualité de la traduction produite par un logiciel de TAO est-elle au rendez-vous ? Leur utilisation représente-t-elle un gain de temps véritable ? Et surtout, tous les documents se prêtent-ils à ce genre d’outils ?
Il faut se rappeler que pour un traducteur indépendant l’achat d’un logiciel d’aide à la traduction représente un investissement financier important dont le retour se situe à court terme. Or, aujourd’hui c’est bien cette catégorie d’indépendants qui directement ou indirectement via les agences opèrent sur le marché de la traduction.

Variétés textuelles
L’efficience et la pertinence de la TAO dépendent largement d’un premier critère fondamental : le type de document traité. Potentiellement, les applications possibles de la TAO sont innombrables (manuels techniques, sites web, rapports ou états financiers, communiqués de presse, …)

L’investissement dans un outil de TAO n’est pas à justifier dans les cas suivants : mise à jour minime d’un document, traduction de documents qui sont plus à caractère littéraire (publicitaire, commercial, correspondance..), traduction de documents dont le taux de répétitivité dans le texte n’est pas suffisant, traduction d’une série de textes qu’il n’aura plus à traduire à l’avenir, Ce qui veut dire que s’il ne possède pas de clients fidèles, et cela est de plus en plus le cas, le traducteur pourra se passer de cet investissement.

La gestion du temps
Les éditeurs de logiciels de TAO utilisent principalement l’argument du gain de temps généré. Cependant s’il y a gain de temps celui-ci est soumis à la pénible contrainte d’alimenter de façon continue les mémoires de traduction ou les glossaires terminologiques afin de rendre ces derniers efficaces.
Par exemple, la création des mémoires de traduction, et notamment l’alignement des fichiers sources et cibles se montre parfois très gourmand en temps, car le système automatisé que représente un programme d’alignement n’est pas doté d’une pensée rationnelle. Les logiciels de première génération, c’est à dire la quasi-totalité des produits encore disponibles sur le marché, analysent les textes comme une suite continue de symboles (lettres, espaces, chiffres, etc.) et ce sont ces symboles qui permettent le repérage et la mise en conformité des segments sources et cibles. Aucun système n’étant parfait, ce type de reconnaissance peut générer un certain nombre d’erreurs d’alignement. Si la mise en page ou bien la structure des textes à aligner est simple, la procédure d’alignement fonctionne très bien. Par contre, dès que la mise en page se complique et que le texte recèle des schémas, des images, des tableaux ou tout élément susceptible de venir perturber le système, des erreurs sont générées. La facilitation du niveau de reconnaissance des segments au sein de la mémoire de traduction est proportionnel au niveau de précision de l’alignement. En conséquence, dans un souci de qualité, le traducteur doit procéder à un travail répétitif de vérification, correction et réagencement de l’alignement pour optimiser la procédure.
Il existe un autre problème important : le traducteur ne se voit jamais rémunéré du temps passé aux procédures d’alignement ou de constitution de glossaires. Il en résulte un déficit au niveau de son chiffre entrainant une perte de ses revenus.
Sur ce point, nous pouvons nous poser une question qui est celle de l’opportunité des tarifs dégressifs appliqués par un certain nombre d’agences de traduction, en fonction du pourcentage de correspondances entre le texte et la mémoire. En effet, dans certains cas, le client ou l’entreprise refuse de payer les correspondances à 100 % sous prétexte que le traducteur possède un système de TAO. On peut dire alors que même si le client fournit la mémoire de traduction, rien ne garantit au traducteur que les segments incorporés soient correctement traduits, outre le fait que le traducteur ne perçoit aucune compensation financière pour le temps passé à aligner ou constituer des glossaires.

La qualité des traductions
L’altération de la qualité d’une traduction peut résulter du principe même de la segmentation. En effet, l’outil TAO découpe le document en unités de traduction qui correspondent soit à des phrases, soit à des portions de phrases. Accorder une importance exagérée à ces séquences peut faire perdre de vue l’intégralité du document et la cohésion globale de la traduction. Un texte n’est jamais traduit selon un concept de phrases isolées, mais dans son ensemble, dans un contexte bien spécifique auquel il faut se conformer et surtout restituer. Le traducteur vérifier que les segments recommandés ne comportent pas de divergences syntaxiques et sémantiques pouvant compromettre le sens global du texte.
Les mémoires de traduction peuvent également présenter un caractère hétérogène dû aux différentes approches de style et de façon de traduire de la part de divers traducteurs. De toute manière, le traducteur devra se préoccuper de préserver la cohérence de la traduction par des moyens de relecture classiques. Il devra notamment s’assurer que les principes stylistiques ont été respectées. L’harmonisation du style du texte, la consultation des glossaires terminologiques en cas de suggestions diverses de terminologie, la relecture globale ou croisée, etc. seront autant de travail supplémentaire pour le traducteur. C’est pour cela qu’il est parfois plus rapide de retraduire un passage existant plutôt que de faire un montage de type copier/coller qui risque d’altérer de façon significative la qualité de la traduction.
En dernier lieu, la terminologie sectorielle, les micro-langages, les slogans, les produits, etc. évoluent au cours du temps et une nouvelle fois le traducteur devra s’assurer du caractère contemporain de la traduction proposée à son client.
Hormis les mises à jour et quelques documents où seules certaines données chiffrées changent nous constatons que le gain de temps apporté par les outils de traduction assistée par ordinateur est tout à fait relatif.

En conclusion, nous pouvons constater que l’opportunité d’utilisation des outils de TAO est influencée par divers facteurs : type de texte traité, qualité des mémoires de traduction et surtout le temps.

Les traducteurs ne doivent ni s’aliéner à ces outils ni les bannir. Ils doivent simplement y recourir lorsque cela est nécessaire. Les outils de TAO présentent des avantages et des inconvénients qu’il faut savoir aborder de manière optimale et surtout analyser en fonction de ses propres besoins et priorités et ceux de ses clients.

1-Traduction automatique et traduction assistée Présidents : Marcel Voisin, Christian Delcourt,Roger Goffin

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