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L’histoire de la chanson “Like a Virgin”

« Like a Virgin »… La chanson est entrée dans la légende. Et pourtant, elle a bien failli ne pas voir le jour, car longtemps rejetée.

C’est en 1983 que l’auteur Billy Steinberg et le compositeur Tom Kelly ont créé cette chanson. Ensemble, ils ont déjà conçu un hit pour la star du country-rock Linda Rondstadt et collaboré au dernier album de Pat Benatar.

« Lorsque j’ai écrit les paroles de ‘Like a Virgin’, j’étais heureux car je venais de me dégager d’une relation amoureuse difficile et j’en entamais une nouvelle. » a relaté Steinberg. « Je me sentais donc comme vierge. J’ai écrit le début du texte en commençant par :

« I made it through the wilderness / J’ai fait ma traversée du désert »

Il explique alors que les paroles ont alors coulé d’elle-même…

« Juste après avoir écrit :

You made me feel shiny and new / Tu me fais me sentir brillant et nouveau

le titre ‘Comme une vierge’ m’est alors apparu. »

Lorsque Tom Kelly lit la première phrase du texte, il trouve que cela sonne « sérieux et romantique ». Lui-même est en train de traverser un pénible divorce et les paroles produisent comme un écho en lui. Kelly imagine d’abord d’en faire une ballade. Steinberg exprime son désaccord et le compositeur tente alors autre chose. Soudain, il joue une ligne de basse inspirée de la chanson « I can’t help myself » des Four Tops, accélère le tempo et introduit quelques notes haut perché. Steinberg s’écrie alors :

– C’est cela !

Ils enregistrent alors une maquette avec un motif de synthétiseur assez proche de celui qui s’est retrouvé sur l’enregistrement final.

Il se passe plusieurs mois avant que la chanson du tandem ne soit retenue : de nombreux artistes et maisons de disques la refusent.

« Tout le monde nous regardait comme si nous étions timbrés, » se rappelle Steinberg. Certains nous ont demandé de changer le titre. Cela semblait risqué par rapport aux paroles des chansons habituelles. J’aimais pourtant l’idée d’un concept qui n’avait pas été tenté auparavant ».

Au début de l’année 1984, Steinberg et Kelly rencontrent Michael Ostin, directeur artistique chez Warner. Ils lui présentent plusieurs chansons, pour la plupart taillées dans le rock. Peu avant de prendre congé, ils dévoilent timidement au magnat de la Warner une échappée libre, un titre qui sonne à la manière des musiques de club, et qu’ils ont écrit en 1983 « Like a Virgin »…

Durant l’écoute de « Like a Virgin », Ostin a comme une illumination. Il perçoit aussitôt combien la petite Madonna pourrait apporter une couleur inattendue à cette chanson d’amour banale en apparence.

À cette époque, Madonna n’est pas encore connue. « Borderline » vient tout juste de sortir et n’est pas encore devenu un hit. Pourtant, Kelly et Steinberg réalisent que la chanson est bel et bien appropriée à cette artiste.

« C’était l’un de ces moments dans le temps et l’espace où les choses s’emboîtent naturellement » a témoigné Kelly.

Steinberg a sa propre explication là-dessus :

« Parfois une chanson ne va aller qu’à un seul artiste. C’était le cas de ‘Like a Virgin’ ».

Madonna comprend immédiatement le potentiel qu’elle peut tirer d’une telle rengaine. Dans sa bouche, les paroles peuvent revêtir suffisamment d’ambiguïté pour créer un effet d’attraction sur la multitude. Une fascination pour le virginal mêlée à la tentation de s’abandonner à la chaleur du contact des corps.

Pour habiller « Like a Virgin », Madonna met à contribution Nile Rodgers, un ex-membre du mythique groupe Chic.

Au départ, Rodgers s’avoue mitigé vis-à-vis de « Like a Virgin » à deux égards. En premier lieu, il estime que le thème interprété au synthétiseur manque de panache. De plus, il affiche sa réserve quant aux paroles, estimant que certains vers pourraient choquer le public conservateur américain, notamment le refrain où elle parle d’avoir été touchée pour la première fois.

Est-il raisonnable de mettre en péril sa carrière naissante par de tels propos, argue Rodgers ? Madonna défend pourtant la chanson bec et ongles, convaincue qu’elle détient une portée universelle auprès des femmes et qu’elle vont toutes s’y reconnaître :

« Perdre sa virginité est la chose la plus important qui puisse arriver à une fille. Cela occupe toutes leurs conversations. »

Rodgers réalise un enregistrement « funky » en mettant à contribution un vrai groupe de musiciens.

La chanson « Like a virgin » s’inscrit dans la lignée des tubes de discothèques qui sont devenues la marque distinctive de Madonna. Le beat qui ouvre le morceau est trempé dans une matière à même d’entraîner les danseurs sur la piste. Pourtant, sa séduction est ailleurs. La rythmique balancée soutient quelques vers adroitement tissés, une substance aguicheuse qui rappelle celle que distillent les fleurs carnivores, pour mieux dévorer leur proie :

Je vais te donner tout mon amour, mon garçon

Ma peur s’évanouit rapidement

[..]

Oh, ton amour a décongelé

Ce qui était apeuré et froid

Survient alors le refrain dont les paroles sont d’une ahurissante sensualité tant elles reposent sur le contraste entre un état de grâce et l’appel vers la volupté :

« Comme une vierge,

Touchée pour la première fois,

Comme une vierge,

Avec le battement de ton cœur tout contre le mien. »

Le 14 septembre 1984, Madonna trouve l’occasion d’exposer sa nouvelle chanson face à une très large audience et va s’employer à le faire avec une emphase et une théâtralité de très grande envergure. Si elle a été conviée à apparaître au Video Music Awards de la chaîne MTV, c’est parce que le vidéoclip de la chanson « Borderline » y a été nominé. Profitant de l’occasion pour forcer les aléas du destin, Madonna ignore superbement ce tube de son premier album. L’occasion est trop belle pour dévoiler « Like a Virgin ». Et faire savoir à la population du Nouveau Monde qu’il faudra désormais compter avec elle.

Perchée sur un immense gâteau de mariage, Madonna fait sensation en interprétant sa nouvelle chanson vêtue d’une robe de mariée d’une limpide blancheur mais s’arrêtant au genou, assortie d’un voile, d’un porte-jarretelles et de bijoux clinquants. Jouant sur l’impact des contraires, elle se tortille d’une manière osée dans une telle tenue, exploitant sans réserve la dichotomie vierge – coquine. Une telle prestation qui transpire de l’aspiration au plaisir sexuel relève du jamais vu à la télévision américaine. Les spectateurs présents dans le studio demeurent eux-mêmes interloqués.

En l’espace de trois minutes savamment préparées, Madonna opère une entrée remarquée sur le théâtre de la célébrité. Elle prouve, instantanément, qu’elle sait cristalliser l’attention sur elle, et user du mélange troublant qui peut exister entre l’attrait pour la pureté et un désir épicurien.

Sur le vidéo-clip de ce brûlot musical, Mary Lambert qui a déjà réalisé le clip « Borderline » se surpasse. Le mini-film exploite la même dualité troublante et s’inscrit dans le fantasme, comme un appel vers les sens. Il a pour décor Venise, la ville des voyages de noces où elle se pavane, dans la tenue noire et sexy qu’on lui connaît usuellement, épousant le mouvement des flots du fleuve qui embrasse la cité. Parallèlement, elle apparaît, tranquille et posée dans sa robe de mariée blanchâtre, que ce soit debout, à côté d’un lion qui avance à ses côtés, ou allongée sur le lit de sa chambre d’hôtel dans l’expectative de ce moment censée la transformer.

La pochette du single est confectionné avec art. Debout et adossée à un muret de la ville de Venise, Madonna apparaît d’un raffinement racé, habillée d’un tricot transparent qui laisse clairement deviner son soutien gorge noir et domine le bas de son ventre dénudé sur un pantalon noir, sans oublier bracelets et colliers. Consciemment ou non, elle s’inscrit à merveille dans l’air du temps de cette époque qui cultive une esthétique mêlée de froideur. « Like a Virgin » tape dans le mille.

Le single, dont la face B s’intitule « Stay », s’inscrit au sommet des charts dès le 22 décembre et y demeure durant six semaines. Madonna décroche ainsi son premier d’une très longue liste de singles n°1. Il atteint la même position en Australie, au Brésil, au Canada, au Chili, en Italie, en Afrique du Sud.

 

Daniel Ichbiah, auteur de la biographie de Madonna : Pop Confessions.

extrait de Madonna de A à Z.

 

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