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La photographie en crise

Après une crise sévère, une partie du monde de la photo est encore aujourd’hui embourbée dans des problèmes structurels et économiques. Cela fait suite aux crises économiques que nous subissons de manière répétée, mais c’est aussi et surtout le fait de la révolution numérique. Le passage trop brutal de l’argentique au numérique mis tout d’abord à mal l’industrie des émulsions argentiques, des produits connexes ainsi que des services associés ; les laboratoires de développement et de tirage.

Il y a tout d’abord les structures « grand public ». Leur disparitions ou leurs rachats aboutirent à l’existence d’un minimum de très grosses entreprises proposant leurs services de tirages en ligne et à des prix sans aucune commune mesure avec ceux « d’avant ».

Viennent ensuite les laboratoires professionnels. Ils assuraient il y a une dizaine d’années encore, les services destinés aux photographes, une profession qui prospérait, profitant de l’insatiable besoin d’images de notre société en expansion depuis l’après-guerre. Aujourd’hui la demande en matière de développement argentique est devenue quasi inexistante, et celle concernant les tirages photo professionnels s’est rétrécie comme une peau de chagrin…

Enfin, outre l’industrie de la photographie, la profession de photographe eu à subir les conséquences de ces changements.

D’abord l’ancien « photographe de quartier », jadis en même temps photographe portraitiste et commerçant, a aujourd’hui disparu. Nous pouvons maintenant nous procurer le matériel et accéder aux services dans des grandes structures commerciales, qui vendent en général également via internet…

Puis il y a les « photographes professionnels » dont le métier consiste à prendre des clichés dans le domaine du journalisme de l’industrie ou de la publicité. Cette profession florissante il y a encore une vingtaine d’années fut elle aussi mise à mal, quoi que de manière très inégale…

Il existait, « avant », une demande importante en matière de prises de vue destinées à la communication, et que les entreprises confiaient aux professionnels de la photo. Outre la publicité, il y avait tous ces travaux courants de prises de vue de produits par exemple, ou encore la « photographie industrielle » destinée aux documentations internes ou promotionnelles, et qui permettaient à un grand nombre de professionnels de travailler et de vivre confortablement. Mais en raison d’un contexte économique défavorable et des possibilités nouvelles offertes par la technologie numérique, les petites et moyennes entreprises se donnèrent les moyens d’assurer elles-mêmes les travaux courants de communication. La première conséquence fut donc une diminution importante de travail pour un certain nombre de photographes. Mais aussi, le déséquilibre entre l’offre et la demande provoqua un effondrement général des prix de la prestation de prise de vue. Egalement, l’utilisation publique des images encore aujourd’hui réglementée par le code de la propriété intellectuelle, et qui permettait aux professionnels de percevoir des droits sur la publication ou l’exposition de leurs images, est en passe de devenir caduque. Dans l’usage, la réalisation sur commande d’un certain type de photos est souvent considérée comme un simple service, et les images comme appartenant entièrement au commanditaire.

Aujourd’hui le monde de la photo est devisé en deux parties inégales. Dans l’industrie et le commerces, la prospérité des grosses entreprises ayant absorbé les petites et éliminé la concurrence, s’oppose à la précarité des petites structures (difficilement) survivantes. Même dichotomie chez les professionnels ; les professionnels de renom qui travaillent pour les grandes entreprises, et les autres…

Gilles Guérin – Photographe à Paris

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